Témoignage d'un parcours PMA : une aventure de doutes et d'espoirs

TĂ©moignage d'un parcours PMA : une aventure de doutes et d'espoirs

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Caroline est une jeune femme pleine de vie ! La vie justement, elle rêve de la porter, de la donner. Avec son ancien compagnon, ils se sont lancés dans l’aventure de la PMA. Une aventure difficile, longue et semée d’inattendus. Caroline est aujourd’hui séparée de cet homme avec qui elle pensait avoir un bébé. Elle nous raconte avec courage, sans tabou, en toute transparence ce parcours PMA : ses craintes, doutes, mais aussi ses espoirs. Découvrez ce beau témoignage, bienveillant. Bonne lecture…


Qui es-tu ?

Prénom : Caroline
Âge : 35 ans

Lexique : la PMA est une procréation médicalement assistée : "l’assistance médicale à la procréation peut permettre à un couple stérile d’avoir un enfant. Il existe différentes techniques prises en charge, sous certaines conditions, par l’assurance maladie."

1ers essais bébé : 1 envie naturelle mais aussi 1 pression sociétale


Peux-tu nous donner le contexte de ta situation ?

Je m’appelle Caroline, j’ai 35 ans. Je vais parler ici de mon parcours de PMA . Ce parcours, nous l’avons vécu avec mon ancien compagnon, nous sommes aujourd’hui séparés. La PMA, c’est simple, ça passe ou ça casse pour le couple. Mais attention, loin de moi l’idée de ne pas être positive sur ce parcours,  bien au contraire ! Il a mis en lumière tout plein de choses.

J’avais envie depuis longtemps d’être maman, mon compagnon beaucoup moins papa. Il ne se sentait pas "prêt" et moi, je n’ai pas "forcé" les choses pour que ça aille plus vite. J’ai choisi d’arrêter ma contraception, je prenais de l’Androcur, qui a été très médiatisée par la suite pour donner des méningiomes au cerveau. J’avais déjà été alertée sur ces complications avant la mise en lumière au grand public et j’ai donc choisi de tout arrêter.

Nous étions alors en couple depuis 8 ans et j’ai à nouveau laissé quelques mois à mon compagnon avant que nous essayons "pour de vrai" d’avoir un enfant. Nous avons été pris en charge assez vite, je suis passée plus jeune par des phases d’anorexie, ma gynécologue m’avait plus ou moins prévenu que nous pouvions avoir des difficultés.

1 mois, 2 mois, 3 mois passent. Toujours rien. Je commence à devenir une pro de mes cycles. 

Au bout de 6 mois, rdv avec ma gynécologue, elle n’a pas attendu plus longtemps, nous avons eu cette chance d’avoir commencé les tests au bout de 6 mois seulement.

Comment te sentais tu avec les enfants de tes amis ou de ta famille ? Ca te pressait, tu en avais très envie ou pas forcement, juste en attente du bon moment ? as tu ressenti une pression de la société, de ton entourage ?

Je suis globalement assez maternante comme femme, j’avais envie d’être maman depuis un moment mais sans réussir à l’exprimer clairement. C’était un sujet un peu tabou entre mon compagnon et moi. Je m’occupais assez facilement des bébés ou enfants autour de moi, je pouponne aujourd’hui toujours pas procuration en attendant je l’espère d’être maman à mon tour :) .

Clairement, la pression de la société et de l’entourage (d’ailleurs, pas l’entourage le plus proche, j’ai pu le constater) existe et c’est parfois très maladroit et intrusif : "alors toujours pas d’enfant ? Il va falloir vous y mettre ! Tu vieillis, vous attendez quoi ? C’est pour quand etc etc".

Comment se sont passés les 1ers essais naturels bébé (avant de savoir que tu aurais un parcours PMA) ? T’es tu préparée, check up classique : gynéco, folates…

Les premiers essais ont été préparés, j’avais été chez la gynécologue, je prenais du Fertifol et j’ai rapidement commencé les tests d’ovulation (au bout d’1 mois), c’est là que je me suis rendue compte que j’ovulais tardivement au regard de la durée de mon cycle, à environ J+18.

Après quelques échecs de conception : les questions sur son corps

Au bout de combien de mois t’es tu inquiétée ? Sentais tu que quelque chose n’allait pas ou tu pensais patienter ?

Je me suis inquiétée assez vite, j’avais les paroles de ma gynécologue qui résonnaient : "votre corps a souffert par le passé, vos doses d’hormones ont pu avoir des impacts". Mais comme nous toutes, je pense qu’on se dit qu’on ne peut pas avoir de soucis, que ça va venir, qu’il faut juste arrêter d’y penser.

C’est ta gynécologue qui vous a fait faire des test assez tôt, étais-tu inquiète ou rassurée d’être tout de suite prise en charge ?

Ca m’a rassuré. Quand je sais que certains gynécologues attendent 2 ans, je trouve que c’est trop. Je trouve ça plus pertinent de faire les tests et de voir que tout va bien plutôt qu’attendre, attendre et se rendre compte des problèmes au bout de 2 ou 3 ans. J’ai eu beaucoup de chance d’être prise en charge si vite. 

Se lancer dans un parcours PMA pour réaliser son envie de bébé

Quels tests avez vous fait ? A quoi ont-ils servi, sont-ils douloureux ou non, combien de temps d’attente pour les résultats ? Comment avez vous réagi aux résultats ?

On a fait toute la panoplie, les spermogrammes pour Monsieur, à 2 mois d’intervalles (sans avoir les résultats qui sont envoyés directement au gynécologue, ce qui est vraiment mieux), la réserve ovarienne (2 fois car elle n’a pas été faite correctement la première fois), les dosage d’hormones, IRM pelvienne (pas douloureux du tout),  la fameuse hystérosalpingographie, la pire pour moi car elle a été faite par une interne (c’est normal, ils doivent appendre) sauf qu’elle n’y arrivait pas, elle a essayé les deux types de ballonnets et n’arrivait pas à bien les placer. J’ai commencé à faire un malaise, la titulaire a pris la relève en urgence.

J’ai eu la chance de pouvoir faire mon IRM et mon examen des trompes à l’hôpital où nous avons été suivis par la suite. Les spermogrammes ont aussi été fait là-bas.

Au niveau du calendrier, nous avons eu les ordonnances pour les premiers tests début novembre (par ma gynécologue de ville). Elle nous a annoncé le 23 décembre que nous partions en PMA. 

Nous avons eu le premier rdv Ă  la PMA en avril.

Pendant ce temps, ma gynécologue avait commencé la stimulation ovarienne (comprimé + dosage d’hormones + déclenchement par injection).

Dans notre couple, les difficultés étaient partagées, j’ovulais tard et mon ex-compagnon avait aussi des anomalies dont je ne parlerai pas au regard de notre séparation. Nous pouvions concevoir naturellement mais ça pouvait prendre des années.

Quand elle nous l’a annoncé, un mardi soir à 20h, mon monde s’est écroulé. Mon ex compagnon n’a eu aucune réaction et moi je me disais : "est-ce qu’il comprend ce que ça veut dire ? Où on va ? Est-ce qu’il va accepter de subir tout ça ?".

J’ai 3 de mes amies qui étaient aussi en parcours (et qui ont toutes eu leur bébé :)) je savais vers quoi on se dirigeait, je savais que ça allait être douloureux.

Je prenais sur moi, je me retenais de pleurer pour ne pas alarmer mon compagnon mais j’étais en panique à l’intérieur.

Quand je lui ai demandé par la suite s’il avait compris ce que ça voulait dire, il était très calme, lui voyait simplement qu’on allait être pris en charge et que c’était une bonne chose.

Savais-tu ce qu’était un parcours PMA avant d’en vivre un ?

Oui, trois de mes amies proches étant en parcours, j’avais un petit aperçu de ce qui allait suivre.

Peux-tu nous raconter ton parcours PMA dans l’ordre chronologique ? Tes sentiments : culpabilité, crainte et/ou rassurée, confiante ?

Année 1 :

Novembre : arrêt de ma contraception

Année 2 :

Avril : début des vrais essais bébé

Novembre : début des examens avec ma gynécologue. Culpabilité de ne pas réussir à concevoir un enfant alors que tant d’autres y arrivent

Décembre :  annonce de la PMA . Choc. Et culpabilité. Et aussi j’aurai préféré être seule "fautive", je savais que j’étais prête à entamer le combat, je n’étais pas certaine au moment de l’annonce que mon compagnon le soit.

Année 3 :

Février : début de la stimulation

Mars : grossesse naturelle et fausse couche précoce. Bizarrement, ça a été plus violent émotionnellement pour mon compagnon et mon entourage que pour moi. Moi j’avais mal dans mon corps mais je rassurais les autres. C’était une période hors du temps.

Avril : premier rdv PMA (toujours sous stimulation ovarienne). Rassurée d’y être enfin.

Mai / juin : tests complémentaires et annonce du protocole d’IIU en première intention (inséminations intra-utérine) pendant 4 à 6 mois avant de passer en protocole de FIV.

Nous avons fait le choix de ne pas commencer le protocole en juillet et d’enchainer les 4 à 6 IIU à la suite si je les supportais. Inconsciemment, je me projetais déjà sur le nombre maximum d’IIU possible…

Septembre : 1ère IIU. J’apprends pendant une semaine avec des infirmières géniales à m’injecter seules les hormones. Mon ex-compagnon aussi. Par la force des choses, nous avons aussi dû apprendre les injections en seringue classique et non en stylo auto-injecteur. 

Octobre : 2ème IIU. Je commence à gouter aux joies de l’imprévu : être appelée à 11h30 pour un déclenchement à 12h00 (Merci mes collègues, merci ma hiérarchie, merci mes infirmières qui étaient toujours dispo pour les urgences !) , Appeler 3 pharmacies pour trouver celle qui a les bonnes seringues en stock pour une injection le jour-même etc

Novembre : 3ème IIU, très compliquée, j’ai mal réagi, on a forcé le traitement (c’est à dire qu’un de mes follicules prêt à être expulsé a régressé et a disparu, nous avons dû procéder à un 2ème protocole d’injection sur le même cycle). Ce protocole a été arrêté en urgence car mes échographies et mes analyses sanguines étaient incohérentes et que mon  corps commençait à "déconner".

Décembre : nous faisons le choix commun avec notre médecin de PMA de faire une pause pour laisser mon corps se reposer.

Je n’ai jamais repris les protocoles.

Un parcours PMA stoppé mais un parcours riche en sagesse


As-tu des conseils pour les jeunes couples qui se lancent dans cette aventure ? (des préparations, des astuces santé ou psy, des spécialistes à consulter, des comptes instagram, des blog, des livres, des podcast)…

En IIU, l’accompagnement psychologique au centre de PMA est facultatif, je vous encourage vivement à en profiter. La psychologue de la PMA sait par quoi nous passons, elle m’a permis d’exprimer auprès de mon compagnon à quel point c’était normal que je ne contrôle pas mes émotions, ni mon caractère. 

J’avais au delà de cet accompagnement en couple un accompagnement individuel qui était aussi indispensable pour moi.

Apprenez à vous piquer vous-mêmes si vous vous en sentez capable ! Cela permet de ne pas être dépendant de ses infirmières et de pouvoir quand même partir en WE :)

C’est normal d’avoir tout le temps envie de vomir, j’ai perdu 10 kg. Certaines vont en prendre 10… Tout est normal, soyez bienveillantes avec vous-mêmes, vous êtes de formidables guerrières.

Messieurs, foutez la paix à vos compagnes même si elles sont pénibles ;)

Laissez vous porter, faites confiance à votre équipe médicale, prenez les choses comme elles viennent.

La PMA apprend la patience, le lâcher prise et la bienveillance envers soi-même.

Vous avez le droit de faire des pauses dans le protocole, vous avez le droit de vous arrêter un mois, 2 mois, 6 mois ! 

Vous vous êtes finalement séparés, mais cela n’avait rien à voir avec la difficulté à avoir des enfants ? Comment vois tu l’avenir, as tu toujours envie d’enfant ? As-tu peur d’avoir des difficultés et/ou appréhendes tu le parcours PMA ? Quel est ton ressenti sur l’avenir ?

Oui, nous nous sommes finalement séparés, je pense que les difficultés dans notre couple étaient peut-être déjà là avant mais en sommeil.

La PMA fait ressortir beaucoup de choses.

Avec le recul, je pense que le parcours m’a libéré, j’ai appris que je pouvais me dépasser et affronter bien plus de choses que je ne pouvais l’imaginer, ça a fait sauter des barrières, j’ai appris à dire ce qui était important, ce qui allait et ce qui n’allait pas et ça m’a surtout permis de réfléchir à ce que je voulais pour ma vie.

Je ne renie en rien mon histoire, elle a été belle et elle m’a construite mais nous n’étions plus en phase. Je pense que la PMA m’a aussi donné la force de dire stop et de mettre un terme à notre histoire.

Je me dis que si ça n’a pas marché, c’est pour une bonne raison, c’est que ma vie est ailleurs et je ne pense pas m’être trompée vu que j’ai rencontré par la suite mon amoureux :).

Je veux des enfants, j’ai réussi à exprimer ce souhait assez vite dans notre histoire et j’ai la grande chance d’avoir trouvé celui avec qui je veux construire mon avenir. Bien sûr j’ai peur. J’ai peur que ça ne fonctionne pas, j’ai peur de me sentir coupable à nouveau mais je sais aussi que je serai prête.

Toutefois, j’espère très fort que le moment venu, la case PMA ne soit qu’un lointain souvenir !

Merci Caroline pour ce beau témoignage ! Prend soi de toi, de ton corps (et de ton amoureux :)) <3